Nouveau livre de Philippe Sionneau : Pao Zhi

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philippe_sionneau_-_paozhiVoici la préface du nouveau livre de Philippe Sionneau : "Pao Zhi - Prescrire les substances médicinales chinoises préparées"

 

C’est l’histoire d’un livre…

Ce livre fut publié initialement sous le titre « Utilisation clinique de la pharmacopée chinoise – Les substances médicinales préparées », en 1994, il y a 18 ans au moment où j’écris ces lignes. Il eut un étrange destin. En France et dans la francophonie, il passa complètement inaperçu, d’une part parce que son éditeur ne fit aucune diffusion sérieuse, d’autre part car il était sans doute et encore aujourd’hui trop en avance sur son temps. En outre, je me rappelle clairement les critiques émanant d’une fameuse école qui prétendait être détentrice d’un enseignement traditionnel et dont certains cadres disaient que les « Pao Zhi » ne servaient à rien, qu’ils n’étaient plus utilisés par les médecins chinois, que le contenu de cet ouvrage était sans doute faux… Je fus surtout étonné du décalage entre le discours de ces gens qui prétendaient soutenir la tradition classique de la médecine chinoise et leurs critiques qui montraient simplement leur ignorance ou leur jalousie ou les deux. En France, nous avons un problème, nous ne voulons pas reconnaître lorsqu’un confrère fait du bon travail. C’est plus fort que nous, nous démolissons systématiquement.

Si cette étroitesse d’esprit et de cœur est très marquée chez nous, elle est absente aux USA sur le plan professionnel. Quand quelqu’un apporte quelque chose de positif à un groupe, il est respecté, accepté, salué. Et c’est ce qui s’est passé avec cet ouvrage. En effet, quand j’ai constaté l’état d’esprit et le niveau de connaissance en médecine chinoise dans mon pays, je me suis tourné vers les Etats-Unis. J’ai envoyé un exemplaire du livre à Bob Flaws qui était alors probablement l’auteur le plus connu aux USA et le patron de la maison d’édition la plus importante dans le domaine de la médecine chinoise, Blue Poppy Press. Juste après l’avoir reçu, Bob m’envoya un fax pour m’annoncer qu’il souhaitait le traduire et le publier immédiatement ! Rendez-vous compte : une « star » de ma profession comprenait le message de ce livre et me traitait à pied d’égalité ! Quel changement d’état d’esprit ! A partir de cette publication américaine, « Pao Zhi, An introduction to the use of processed Chinese medicinals », je reçus des encouragements de confrères américains, australiens, allemands, suisses (alémaniques) et anglais, je fis la connaissance de mon meilleur ami dans la profession, Frank Butler, je fus connecté avec les plus grands chercheurs et auteurs anglo-saxons et l’élite m’accepta comme l’un des leurs. Suite à cette édition, j’ai publié pas moins de 9 autres ouvrages chez Blue Poppy Press dont certains sont des références dans les écoles américaines et pour les praticiens. Depuis, j’ai enseigné de nombreuses fois aux USA, été invité dans des congrès internationaux, échangé avec les plus grands noms de la médecine chinoise…

Le même livre en France ne m’apporta que le mépris, l’indifférence et les critiques, alors qu’Outre-Atlantique il me servit de sésame pour me connecter au dynamisme d’une profession fantastique.

Cela fait 20 ans que je pratique, étudie, fais de la recherche, enseigne et accumule de l’expérience en pharmacologie chinoise. Aujourd’hui, je peux dire que notre approche actuelle n’est pas assez rigoureuse ni assez respectueuse de la tradition chinoise. On ne peut pas clamer pratiquer la « médecine Traditionnelle chinoise » et en même temps prescrire des substances médicinales chinoises sous forme de poudre concentrée à 1 mesurette 3 fois par jour selon la base d’un code d’un « grand formulaire » bourré d’erreurs. Cette approche détruit 2000 ans d’expérience clinique en un claquement de doigt. Elle nous coupe de la Tradition. La Tradition n’est pas est terme que l’on met sur une carte de visite ou une plaque professionnelle pour nous distinguer de la médecine conventionnelle. La Tradition c’est l’assimilation, la transmission et le respect de règles, principes, méthodes, processus, précis, de génération en génération. Est-ce que c'est cela que nous faisons en pharmacologie chinoise dans la francophonie ? Je peux comprendre que toute nouvelle profession qui vient de naître ne peut pas être parfaite immédiatement. J’accepte cela. Mais, si nous voulons imposer cette approche médicale dans nos pays européens, nous devons passer à une autre étape, celle de la professionnalisation. Et pour cela, dans le domaine de la pharmacologie chinoise, nous devons :

  1. Mettre en place de vraies formations de haut niveau. Il faut arrêter l’amateurisme.
  2. Arrêter de faire des poudres concentrées la base automatique des prescriptions.
  3. Revenir aux plantes entières avec l’utilisation des « Pao Zhi » en employant des méthodes galéniques qui permettent de gagner du temps et de faire des économies à nos patients.
  4. Apporter de nombreux produits qui manquent aux prescripteurs, tels que les pilules sèches fabriquées à la demande, des spécialités pour pédiatrie, des spécialités de remèdes « externes », etc. Les laboratoires doivent travailler main dans la main avec les leaders de la profession pour développer les outils nécessaires au développement harmonieux de cet art. 
  5. Revenir aux principes traditionnels qui sont bien plus puissants que les déformations et adaptations modernes qui visent à nous rendre la vie plus facile mais qui en réalité détruisent l’essence de cette médecine.
  6. Se battre au niveau national et européen pour que l’on permette à des professionnels spécialement formés de prescrire les substances médicinales spéciales comme Fu Zi, Ma Huang, Xi Xin, Han Fang Ji, etc.

Tout cela permettrait de rendre l’usage de la pharmacologie chinoise bien plus puissant, bien plus efficace et d’aider de très nombreuses personnes malades à trouver des solutions à leurs souffrances. Car au final, c’est bien de cela dont il est question : aidez les gens qui souffrent. La pharmacologie chinoise peut y parvenir si on se donne la peine de se hisser au niveau qu’elle exige.

          Philippe Sionneau
          Sitges, Espagne
          1er avril 2012

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