Histoire
Histoire succincte de la médecine chinoise
Epoque des Trois Dynasties (San Dai)
Il s’agit de la période comprenant les dynasties Xia (21ème - 18ème siècle av. J.-C.), Shang (18ème - 11ème siècle av. J.-C.) et Zhou (1121-771 av. J.-C.). La pratique de la médecine à cette époque n’est pas bien connue, car aucun texte n’a été retrouvé. Seuls quelques instruments (aiguilles d’acupuncture en pierre notamment) témoignent de l’existence d’une médecine chinoise primitive, il y a plus de trois mille ans. On peut affirmer que les balbutiements de la médecine chinoise commencèrent entre 1000 et 500 av. J.-C. Il est possible que ce soit antérieur mais il n’existe aucune preuve archéologique.
Epoque des Printemps et Automnes (Chun Qiu) et des Royaumes Combattants (Zhang Guo)
L’époque des Printemps et Automnes (770 - 476 av. J.-C.) correspond à la fin de la phase de développement strictement empirique de la médecine chinoise et au début de sa transformation en système médical cohérent. Ce développement se poursuit durant les Royaumes Combattants (475 - 221 av. J.-C.).
Cette période est également marquée par l’existence d’un des premiers grands noms de la médecine chinoise : Qín Yuè Rén 秦越人alias Biǎn Què 扁鹊 qui est l’un des plus grands personnages de la tradition médicale chinoise. C’est le premier médecin à avoir eu une biographie dans l’histoire chinoise. Il vécu durant la période des Royaumes Combattants, au Vème siècle av. J.-C. Biǎn Què était réputé pour être un grand expert dans le diagnostic : observation, olfaction/audition, interrogatoire et palpation. Il était particulièrement doué dans la palpation du pouls. Il maîtrisait de nombreuses spécialités médicales, et en particulier la gynécologie et surtout la pédiatrie. Il s’opposa aux pratiques médicales basées sur les superstitions et la sorcellerie. D’après l’ouvrage historique Hàn Shū 汉书 (Le livre des Han), Biǎn Què écrivit deux ouvrages qui sont actuellement disparus. La légende lui attribut la paternité du Nán Jīng (Classique des difficultés), ce qui est peu probable. Dans tous les cas, on le considère comme l’un des « sages » de la médecine chinoise.
L’époque des Royaumes Combattants (475 - 221 av. J.-C.) est une période clef durant laquelle la médecine chinoise devient une « médecine savante » qui se détache des superstitions et autres croyances magiques. La plupart des concepts théoriques et des fondements dialectiques sont élaborés à cette époque, comme celle de « l’énergie » (Qi), du « Yin/Yang » et des cinq mouvements (Wu Xing). Grâce à l'application de ce mode de représentation et de codification de l’univers et de ses phénomènes aux expériences accumulées pendant des siècles, la médecine chinoise acquiert toute sa cohérence interne.
Le fait historique le plus important de cette période est la naissance du « classique interne ». Le Huáng Dì Nèi Jīng 黄帝内经, c’est-à-dire le Classique interne de l’Empereur Jaune (aussiappelé Nèi Jīng 内经) est considéré comme l’ouvrage le plus ancien de la médecine chinoise. C’est la « Bible » fondatrice qui pose les fondements théoriques de la médecine chinoise. Selon les historiens et spécialistes chinois, les principaux textes du Nèi Jīng (Classique interne) ont été rédigés pendant la période des Royaumes Combattants (475 à 221 av. J.-C.) puis complétés pendant les époques suivantes, en particulier sous les Han (206 av. jc. - 220 ap. jc.) mais aussi sous les Tang (618-907). Ce n’est qu’au début des Han occidentaux (206 av. J.-C.- 25 ap.J.-C.) que l’essentiel de ces textes commence à être regroupé dans un seul ouvrage. Ce classique est considéré depuis au moins 2500 ans comme l’ouvrage absolument indispensable pour apprendre la médecine chinoise. Il a été le point de départ des développements théoriques de très nombreux courants médicaux. La grande majorité des médecins célèbres qui ont élaboré cette tradition médicale sont partis de cette référence incontournable. Il est reconnu par tous comme la référence absolue et indiscutable.
Dynastie Qin (221-206 av. J.-C.)
Le premier empereur connu sous le nom de Qín Shǐ Huáng Dì 秦始皇帝, obsédé par la recherche de l’immortalité, regroupe autour de lui un grand nombre de savants, médecins et alchimistes, dont les investigations s’orientent essentiellement vers les techniques de longévité et la recherche de l’immortalité. Paranoïaque, il fait exécuter de nombreux lettrés et ordonne un gigantesque autodafé. Seuls certains ouvrages de médecine, d’agronomie et de divination sont épargnés. A sa manière, il aura favorisé les méthodes de prévention et d’hygiène de vie que l’on retrouve en médecine chinoise.
Dynastie Han (206 av. J.-C. - 220 apr. J.-C.)
C’est sous cette dynastie que se structurent, s’organisent, s’ordonnent les théories et la pratique de la médecine chinoise. C’est à cette époque que sont synthétisés les différents courants médicaux qui donneront naissance à la médecine chinoise telle que nous la connaissons aujourd’hui. Plusieurs faits marquants sont à retenir. D’abord, la pharmacologie chinoise s’affirme, notamment grâce à deux ouvrages fondamentaux : Shén Nóng Běn Cǎo Jīng 神农本草经 (La matière médicale de Shen Nong) et Shāng Hán Zá Bìng Lùn 伤寒杂病论 (Traité des lésions du froid et de maladies diverses).
Le Shén Nóng Běn Cǎo Jīng est la toute première matière médicale, produite autour des dynasties Qin et Han par des auteurs inconnus mais attribuée à Shén Nóng 神农 l’un des empereurs mythiques, fondateur de la civilisation chinoise. Elle intègre 365 substances médicinales (dont 252 végétales, 67 animales, 46 minérales), classées en trois grands groupes selon le niveau de toxicité et d’utilité des remèdes. Cet ouvrage servit de base au développement de la pharmacologie chinoise. C’est une référence incontournable depuis 2000 ans.
Le Shāng Hán Zá Bìng Lùn 伤寒杂病论 (Traité des lésions du froid et de maladies diverses) est l’un des plus grands classiques de la médecine chinoise, probablement le plus important après le Nèi Jīng (Classique interne). Il fut écrit par Zhāng Jī 张机 alias Zhāng Zhòng Jǐng 张仲景 (150-219 ?), le « sage de la médecine ». Ce texte influença toutes les générations jusqu’à nos jours et constituent un monument essentiel, à la fois de la pharmacologie chinoise et de la pathologie clinique. Il est à la base d’un des principes les plus fondamentaux de la médecine chinoise : la sélection des syndromes selon la différenciation des syndromes (biàn zhèng lùn zhì 辨证论治).
Un autre texte fondateur du système médical fut écrit durant les dynasties Han, c’est le Nán Jīng 难经, le Classique des difficultés. Il éclaircit un certain nombre de sujets difficiles, de théories complexes ou d’incohérences présents dans le Nèi Jīng (Classique interne) ou qui circulaient durant les dynasties Qin et Han. C’est un ouvrage fondamental pour une meilleure compréhension de l’art médical chinois et de sa « bible » : le Nèi Jīng (Classique interne).
Dans les médecins influents de cette période, nous retrouvons Huà Tuó 华佗 (env. 141-208) qui est l’un des personnages les plus importants de toute l’histoire de la médecine chinoise. Il participa activement à ce grand élan de construction de la médecine chinoise sous les dynasties Han. Il est à l’origine de grands progrès dans de nombreux domaines de la santé : chirurgie (la légende veut qu’il inventa l’un des premiers anesthésiques, má fèi sǎn 麻沸散, et qu’il fut un chirurgien hors pair, on le surnomme le « père de la chirurgie »), pharmacopée, « psychothérapie », acupuncture, qì gōng…Véritable légende, on lui attribut des guérisons miraculeuses à tel point qu’aujourd'hui lorsque l’on veut flatter un médecin on lui donne le surnom de « Huà Tuó vivant »… Huà Tuó et Zhāng Zhòng Jǐng furent les deux plus importants médecins des Han qui influencèrent toutes les autres générations de médecins jusqu’à nos jours.
Des Trois Royaumes (220-265) aux dynasties du Nord et du Sud (420-589)
Durant cette période, la médecine se développa sur divers plans. Par exemple, Huáng Fǔ Mì 皇甫谧 (214-282), contribua au développement de l'acupuncture, en apportant de nombreuses précisions sur les méridiens et les points, dans le Zhēn Jiǔ Jiǎ Yǐ Jīng 针灸甲乙经(Classique de l’ABC de l’acupuncture et de la moxibustion), publié vers 259 ap. J.-C. Il constitue après le Líng Shū (Pivot Spirituel - la 2ème partie du Classique interne) le premier grand classique dédié principalement à l’acupuncture et à la moxibustion. Il est la grande référence incontournable en acupuncture depuis toujours.
Wáng Shū Hé 王叔和 (201-280), de son côté fut un personnage important pour le développement de la médecine chinoise. Ministre de la médecine impériale sous la dynastie Jin de l’ouest (265 - 316), il synthétisa tout le savoir ancestral sur les pouls et le compila dans le fameux Mài Jīng (Classique des pouls). C’est l’ouvrage spécialisé en pulsologie le plus ancien. Il est toujours une référence incontournable sur le sujet dix sept siècles après. De plus, Wáng Shū Hé reconstitua et remis en ordre le Shāng Hán Zá Bìng Lùn 伤寒杂病论 (Traité des lésions du froid et des maladies diverses), le fameux ouvrage de Zhāng Zhòng Jǐng (150-219 ?) qui fut dispersé et oublié à cause des troubles sociaux de l’époque. C’est probablement grâce à lui que cette pièce maîtresse de l’édifice théorique de la médecine chinoise ne disparut pas.
Gě Hóng 葛洪 (env. 283-363) est un autre célèbre médecin, pharmacologue, taoïste et alchimiste de la dynastie Jin de l’Est. Il est l’auteur de deux livres de références le Zhǒu Hòu Bèi Jí Fāng (Prescriptions d’urgence) et le Bào Pǔ Zi Nèi Piān (Ecrit interne du maître qui embrasse la simplicité). C’est l’un des alchimistes et taoïstes les plus fameux de l’histoire chinoise. Obsédé par les élixirs de longue vie et de préservation de la santé, Gě Hóng fit appel à l’alchimie pour créer de nouveaux remèdes. Ceci est très clair dans le Bào Pǔ Zi Nèi Piān. Dans le Zhǒu Hòu Bèi Jí Fāng (Prescriptions d’urgence), il s’avère être un fameux médecin, pharmacologue mais aussi un ancêtre de l’immunologie…On lui doit également la description de la variole, de la tuberculose, de la peste, de l’hépatite virale, de la lymphangite aiguë.
Táo Hóng Jǐng 陶弘景 (456 - 536) est autre personnage important de cette époque. Il vécut sous la dynastie du Sud et du Nord. Médecin, lettré, taoïste, alchimiste, herboriste, il fut l’auteur de plusieurs ouvrages dont le Běn Cǎo Jīng Jí Zhù 本草经集注(Commentaire du classique de la matière médicale), paru en 536 qui est probablement le commentaire le plus ancien du Shén Nóng Běn Cǎo Jīng 神农本草经 (La matière médicale de Shen Nong). Il est aussi l’auteur prétendu du Yǎng Xìng Yán Mìng Lù 养性延命录 (Recueil pour nourrir la nature innée afin de prolonger la vie).
Dynasties Sui (581-618) et Tang (618-907)
Cette époque marque l’avènement d’une sorte d’âge d’or pour la civilisation chinoise, plus particulièrement au VIIIème et au début du IXème siècle. La relative stabilité politique favorise le développement de l’économie, des sciences, des arts et des techniques.
L’enseignement de la médecine chinoise devient officiel et à partir de 624, les études sont sanctionnées par des examens d’Etat. Le premier codex pharmaceutique, le Táng Běn Cǎo 唐本草 (matière médicale des Tang) est rédigé en 659, sur ordre impérial. C’est sous les Tang que les échanges avec l’Inde, la Perse et Byzance atteignent leur apogée, ce qui conduit à l’introduction de nombreuses substances exotiques dans la pharmacopée chinoise.
Cháo Yuán Fāng 巢元方 (550-630) écrit par décret impérial et publie en 610 ap. jc. le Zhū Bìng Yuán Hòu Zǒng Lùn 诸病源候总论 (Traité général sur l’origine et les signes cliniques de toutes les maladies). Cet ouvrage est considéré comme le tout premier à présenter systématiquement l’étiologie, la pathogénie et la symptomatologie des maladies. Il fut la référence en la matière durant une très longue période et influença le développement de la médecine chinoise. Ce livre fut un manuel d’étude obligatoire pour devenir médecin sous la dynastie Song.
Les exégèses de textes anciens se développent, notamment au sujet du Huáng Dì Nèi Jīng (Classique interne de l’Empereur Jaune). Yáng Shàng Shàn 杨上善 (585-670), puis Wáng Bīng 王冰 (env. 710-805), deux éminents médecins, produisent les deux plus importantes versions commentées et réorganisées de ce texte fondamental, qui servent encore de nos jours de référence.
Le plus fameux médecin de cette époque est indéniablement Sūn Sī Miǎo 孙思邈 (581 - 682). Il excellait en gynécologie et en pédiatrie. Nous lui devons notamment deux œuvres colossales d’une grande richesse clinique et pratique : le Qiān Jīn Yào Fāng (Prescriptions majeures de milles onces d’or) et le Qiān Jīn Yì Fāng (Prescriptions supplémentaires du Qian Jin [Yao Fang]). On peut considérer ces deux livres comme la première encyclopédie médicale de l’histoire de Chine. Cet érudit, humaniste et défenseur de l’éthique médicale, influença sur de nombreuses générations de médecins en Chine et au Japon. Ses travaux constituent toujours aujourd’hui une référence essentielle. Sūn Sī Miǎo était avant tout un phytothérapeute qui considérait que l’acupuncture, la moxibustion, la diététique chinoise et la phytothérapie étaient des thérapeutiques complémentaires. On le nomma « roi des médicaments » (yào wáng 药王).
Dynasties Song du Nord et du Sud (960-1279)
Sous les Song, de nombreuses découvertes techniques auront une influence sur la médecine. La découverte de l’imprimerie à caractères mobiles permet la diffusion du savoir médical. L’utilisation de la distillation permet la production de nouvelles substances thérapeutiques. L’anatomie fait des progrès, en partie grâce au développement de la dissection dans la médecine légale. Les premiers essais de variolisation sont fait autour 1014.
La localisation des méridiens et des points se standardise, grâce à la publication de planches d’acupuncture et à la réalisation de modèles humains en bronze (Tóng Rén 铜人hommes de bronze) pour l’étude de l’acupuncture. Ces statues, de formes et de dimensions humaines, comportaient des petits trous à l'emplacement des points d'acupuncture. Des ouvrages tels que le Tóng Rén Shū Xué Zhēn Jiǔ Tú Jīng 铜人腧穴针灸图经 (Classique illustré des points d’acupuncture et de moxibustion de l’homme de bronze) de Wáng Wéi Yī 王惟一 (987-1067) accompagnent ce développement important de l’acupuncture.
Parallèlement, la pédiatrie et de la gynécologie s’imposent comme des spécialités à part entière grâce à des ouvrages de références comme le Xiǎo Ér Wèi Shēng Zǒng Wēi Fāng Lùn 小儿卫生总微方论 (Traité des formules générales pour l’hygiène des enfants), le Xiǎo Ér Yào Zhèng Zhí Jué 小儿药证直诀 (Décisions justes sur les médicaments des syndromes des enfants) de Qián Yǐ 钱乙 (1032-1113) et le Yòu Yòu Xīn Shū 幼幼新书 (Nouveau livre sur les enfants) de Liú Fǎng 刘昉 (1080-1150). Les grands gynécologues sont Chén Zì Míng陈自明(env. 1190-1270) qui écrivt le Fù Rén Liáng Fāng Dà Quán 妇人良方大全 (Grande somme de formules excellentes pour les femmes) et Zhū Duān Zhāng (朱端章) (12ème siècle) auteur de plusieurs texte sur ce thème.
L’un des ouvrages les plus importants de cette période est le Sān Yīn Jí Yī Bìng Zhèng Fāng Lùn 三因极一病症方论 (Formulaire des maladies selon les trois causes) publié en 1174 et écrit par Chén Yán 陈言(1131-1189). C’est dans ce livre qu’il développa pour la première fois la classification des maladies selon trois catégories : externes, internes et ni interne ni externes. Cette classification influença toutes les générations postérieures jusqu’à nos jours.
Dynasties Jin (Nord) (1115 -1234) et Yuan (1271-1368)
Cette période est principalement marquée par l'influence de quatre grands maîtres, chacun ayant fondé un courant médical spécifique, issu de son interprétation de certains aspects du Nèi Jīng (Classique interne) et de son expérience clinique.
Liú Wán Sù 刘完素 (1120-1200) est le premier des quatre grands maîtres de la période Jin/Yuan. Il est le chef de file de « l’école du froid et du frais » (hán liáng pài - 寒凉派) qui affirme que les maladies ont pour source et caractéristique principales la chaleur. Il fit des six pervers environnementaux que sont le vent, la chaleur, le froid, l’humidité, la sécheresse et la canicule le fondement de son système étiologique. Et parmi eux il donna à la chaleur la place d’honneur, d’où l’utilisation de substances médicinales froides ou fraîches qui donnèrent leur nom à cette l’école. Cette théorie s’intitule « zhǔ huǒ lùn 主火论 » (théorie du feu souverain) ou encore « huǒ rè lùn 火热论 » (théorie du feu et de la chaleur). Son approche influença fortement le courant des maladies de la tiédeur (wēn bìng 温病) sous la dynastie Qing. Il est l’auteur de plusieurs ouvrages fondamentaux dont le Sù Wèn Bìng Jī Qì Yí Bǎo Mìng Jí 素问病机气宜保命集 (Recueil sur les mécanismes des maladies et les aptitudes du qì pour protéger la destinée selon les simples questions) et le Sù Wèn Xuán Jī Yuán Bìng Shì 素问玄机原病式 (Règles des mécanismes et de la source des maladies basées sur les simples questions).
Zhāng Cóng Zhèng 张从正 (1156-1228) est le deuxième des quatre maîtres de la médecine « Jin Yuan ». Il fut le principal continuateur de la pensée de Liú Wán Sù (1120-1200). Il développa l’utilisation de trois méthodes (sān fǎ 三法), la sudorification, la purgation et la vomification qui visaient à expulser ces six pervers climatiques qui envahissent le corps. En attaquant ces six pervers, la santé devait se rétablir automatiquement. Pour cette raison cette école est nommée gōng xià pài (攻下派)que nous pourrions traduire par « école de l’attaque et de la purgation ». Un des livres clé de Zhāng Cóng Zhèng où il expose sa doctrine est le Rú Mén Shì Qīn 儒门事亲 (Soins des confucianistes à leurs parents).
Lǐ Dōng Yuán 李东垣 (1180-1251) est considéré le troisième des quatre grands maîtres de l’époque Jin/Yuan. C’est le chef de file de l’école de la tonification de la terre (bǔ tǔ pài 补土派). En effet, à travers son œuvre, il mit en avant le dérèglement de la rate et de l’estomac comme cause majeure des maladies (en dehors des lésions externes). Il est l’auteur de plusieurs ouvrages comme par exemple le Yī Xué Fā Míng 医学发明 (Eclaircissement de la science médicale), le Nèi Wài Shāng Biàn Huò Lùn 内外伤辨惑论 (Traité sur les erreurs de différenciations des atteintes internes et externes), le Pí Wèi Lùn 脾胃论 (Traité de la rate et de l’estomac) et le Lán Shì Mì Cáng 兰室秘藏 (Les secrets cachés de la chambre de l’orchidée), etc. Même s’il est difficile de faire un palmarès, Lǐ Dōng Yuán peut être considéré comme l’un des dix plus importants personnages de la tradition médicale chinoise.
Zhū Dān Xī 朱丹溪 (1281-1358) est le dernier des quatre grands maîtres des dynasties Jin et Yuan. Influencé par les théories des trois premiers maîtres de la période Jin/Yuan et de Wáng Hǎo Gǔ, il développa sa propre approche. L’une de ses théories centrales est de dire que le yáng tend à être excessif et le yīn déficient. Il préconise alors de traiter les maladies en nourrissant le yīn et en abaissant le feu (yáng). Il est donc considéré comme le représentant de l’école de « nourrir le yīn » (zī yīn pài 滋阴派). C’est dans le Gé Zhì Yú Lùn (Traité supplémentaire de l’étude des phénomènes de la nature) écrit en 1347 puis ensuite dans le Dān Xī Xīn Fǎ (Le cœur des méthodes de Dan Xi) qu’il décrit ce point de vue.
Dynastie Ming (1368-1644)
De grands médecins continuèrent à développer les théories et l’application clinique de la médecine chinoise. L’un des plus grands phénomènes des Ming est incontestablement Lǐ Shí Zhēn 李时珍 (1518-1593). Les spécialistes pensent qu’il fut l’auteur de dix sept ouvrages. Seuls trois d’entre eux nous sont parvenus. Ils sont considérés comme des œuvres fondamentales. Il s’agit du Qí Jīng Bā Mài Kǎo 奇经八脉考 (Etudes des huit vaisseaux extraordinaires) paru en 1572, du Bīn Hú Mài Xué 濒湖脉学 (Enseignement sur les pouls de Bin Hu) paru en 1564 et qui est toujours aujourd’hui une source incontournable pour la pulsologie chinoise et enfin du colossal Běn Cǎo Gāng Mù 本草纲目 (Compendium de la matière médicale), l’une des plus importantes références en termes de pharmacologie chinoise parue en 1596, trois ans après sa mort. On lui doit de nombreuses innovations tant sur le plan théorique que clinique.
Un autre géant de la dynastie Ming est Zhāng Jiè Bīn 张介宾 (1563-1640). C’est l’un des plus célèbres commentateurs du Nèi Jīng (Classique interne) et on lui doit de nombreux éclaircissements sur des sujets difficiles. Ses œuvres majeures sont le Lèi Jīng 类经 (Classique des classifications), le Lèi Jīng Fù Yì 类经附翼 (Complément annexé du classique des classifications), le Lèi Jīng Tú Yì 类经图翼 (Complément illustré du classique des classifications)et le Jǐng Yuè Quán Shū 景岳全书 (Œuvre complète de Jing Yue). Sa théorie personnelle la plus célèbre est de dire que le yáng n’est jamais en excès. Au contraire, étant à la base de la vie, il est plutôt en vide, d’où la nécessité de le renforcer. C’est pour cela qu’on fait de lui l’un des principaux représentants de « l’école de la tonification tiède » (wēn bǔ pài 温补派).
Mais d’autres médecins célèbres apportèrent leur contribution pour une meilleure compréhension et application de la médecine chinoise comme Téng Hóng 腾弘, Yú Tuán 虞抟 (1438 – 1517),Gōng Tíng Xián 龚廷贤 (1522-1619), Sūn Yī Kuí 孙一奎 (≈ 1522 - 1620), Wáng Kěn Táng 王肯堂 (1549-1613), Wú Kūn 吴昆(1551-1620), Mǎ Shí 马莳, Lǐ Zhōng Zǐ 李中梓 (1588 - 1655), Zhào Xiàn Kě 赵献可, Lǐ Chān 李梴, pour n’en citer que quelques-uns.
Il faut aussi noter que l’acupuncture eut aussi ses leaders comme Yáng Jì Zhōu 杨继洲 (1522-1620) qui publia en 1601 le Zhēn Jiǔ Dà Chéng 针灸大成 (Compendium de l’acupuncture et de la moxibustion). Il présente une synthèse de l’ensemble des connaissances sur l’acupuncture et la moxibustion de son origine jusqu’à son époque. Ses nombreuses formules et techniques d’aiguilles inspirèrent de nombreuses générations d’acupuncteur jusqu’à nos jours. Il est à noter que les indications des points d’acupuncture proviennent intégralement du Zhēn Jiǔ Jù Yīng 针灸聚英 (Collection du meilleur sur l’acupuncture et la moxibustion) publié en 1529 et écrit par Gāo Wǔ 高武.
Dynastie Qing (1644-1911)
C’est à la fin des Ming et durant la dynastie des Qing que se développa le dernier développement théorique et clinique de la médecine chinoise que l’on nomme « l’école des maladies de la tiédeur » (温病学派 - wēn bìng xué pài), marquant un tournant majeur dans l’étude de l’épidémiologie en Chine. C’est un courant de pensée qui vint compléter le point de vue de Zhāng Zhòng Jǐng. Les autres grands maîtres de cette école sont Wú Yòu Kě (吴又可), Yè Tiān Shì (叶天士), Wú Jū Tōng (吴鞠通),Xuē Shēng Bái (薛生白) et Wáng Mèng Yīng (王孟英). Ils ont introduit la notion de pénétration de la chaleur à travers quatre couches (sì fēn 四分) et de l’humidité chaleur à travers les trois foyers (sān jiāo). Les ouvrages majeurs de ce développement sont le Wēn Rè Lùn 温热论 (Traité de la tiédeur et de la chaleur), le Wēn Bìng Tiáo Biàn 温病条辨 (Analyse détaillée des maladies de la tiédeur), le Wēn Rè Jīng Wěi 温热经纬 (Compendium sur [les maladies] de la tiédeur et de la chaleur).
Un autre grand médecin de la dynastie Qing est Wáng Qīng Rèn 王清任 (1768-1831). Il insistait sur le fait qu’un médecin devait connaître l’anatomie interne, notamment des organes avant de soigner. C’est pour cela qui se rendait dans les cimetières et les lieux d’exécutions pour étudier l’anatomie. Ceci donna naissance à l’un de ses ouvrages majeurs : le Yī Lín Gǎi Cuò 医林改错 (Correction des erreurs de la forêt médicale) paru en 1830 qui tenta de corriger les erreurs anatomiques des textes anciens. Sur le plan clinique, il pensait que beaucoup de maladies étaient provoquées par une stase de sang par stagnation de qì ou vide de qì. Ainsi, il mit au point une série de formules pour traiter la stase de sang qui sont très utilisées aujourd’hui.
Bibliographie
Histoire de la médecine chinoise. Dominique et Marie-Joseph Hoizey. (Payot).
Origine et développement de la médecine chinoise. Genming Huang (http://www.zhongyi.net)
History of medicine in China. Francis F. Hong. MacGill Journal of medicine. 2004
Science and civilization in China. Joseph Needham. (Cambridge)
The Evolution of Chinese Medicine. Asaf Goldschmidt (Routledge)