Pourquoi la médecine chinoise « classique » va-t-elle révolutionner votre pratique ?

Dans Théories fondamentales Dans Phytothérapie chinoise

Partie 1

Le Shāng Hán Lùn (Traité des lésions du froid) est probablement après le Nèi Jīng (Classique interne) le classique le plus réputé de la médecine chinoise. En même temps, c’est l’un des textes les plus largement incompris et mal interprété. C’est toujours le cas dans la population des étudiants et des praticiens de médecine chinoise en France et dans la francophonie. Certains pensent que cet ouvrage essentiel traite uniquement les pathologies induites par un pervers externe, d’autres qu’ils ne traitent que des syndromes provoqués par le froid, sans parler de ceux qui pensent qu’il décrit la progression pathologique du froid dans six couches « énergétiques » du corps.

Et c’est extrêmement triste car j’ai pu constater trois choses depuis près de 25 ans que je baigne dans le monde de la médecine chinoise. D’abord tous les praticiens qui m’ont étonné par leurs résultats cliniques hors norme étaient tous, sans exception, des passionnés du Shāng Hán Lùn (Traité des lésions du froid) et du Jīn Guì Yào Luè (Précis du coffre d’or), qu’ils soient chinois ou occidentaux. Ensuite, tous ceux qui sont en recherche constante pour s’améliorer dans leur pratique et qui ont un minimum de référence, reviennent tous à un moment ou un autre à ces deux textes fondamentaux. Enfin, tous les courants actuels qui clament un retour à la Médecine Chinoise « Classique » opposée à la Médecine « Traditionnelle » Chinoise universitaire émanent de l’œuvre de Zhāng Zhòng Jǐng, tous, sans exception !

Beaucoup de français critiquent l’enseignement et la pratique de l’approche contemporaine universitaire chinoise. Grâce à la résurgence des textes canoniques comme le Shāng Hán Lùn (Traité des lésions du froid) et le Jīn Guì Yào Luè (Précis du coffre d’or) et à ces différents courants qui revendiquent une médecine chinoise plus « ancestrale », plus « antique », plus « originelle », ils vont pouvoir s’en donner à cœur joie. Et je peux dire aujourd’hui que l’avenir de la médecine chinoise passera par ces approches plus « classiques » qui permettront aux plus exigeants d’être nourris au sein des plus anciennes traditions chinoises.

A travers cette chronique, je voudrais présenter l’une de ces écoles qui prônent une médecine chinoise plus authentique, j’ai nommé l’école des prescriptions classiques (Jīng Fāng Pài 经方派). Je suis impliqué dans son étude et je dois dire que mes résultats cliniques ont été bouleversés par cette approche. Je souhaite sincèrement que mes confrères prennent conscience qu’ils peuvent aller bien plus loin dans leur pratique et qu’en changeant certains points de vue, en appliquant une nouvelle méthodologie, ils peuvent transformer leur performance en cabinet pour le plus grand bénéfice de leurs patients. La magie de la médecine chinoise existe toujours, j’en suis témoin et je voudrais qu’elle soit diffusée auprès de tous les étudiants et les cliniciens.

Un préambule fondamental

Lorsqu’on étudie le Shāng Hán Lùn (Traité des lésions du froid) et le Jīn Guì Yào Luè (Précis du coffre d’or), on doit garder à l’esprit qu’il est difficile d’avoir des certitudes sur ce qu’a véritablement voulu dire Zhāng Zhòng Jǐng, il y a presque 2000 ans. Il n’existe donc pas une Vérité sur son enseignement mais des interprétations possibles. Cependant, toutes les interprétations ne sont pas aussi efficaces. Finalement, c’est la clinique qui nous permet de savoir si notre compréhension des classiques est juste ou non. Le point de vue que je vais exposer se fonde sur une interprétation qui selon moi est l’une des plus pertinentes pour une pratique efficace en Occident.

Deux courants médicaux

Schématiquement, on peut dire qu’il existe deux grands courants médicaux en Chine. Celui qui fut inspiré par le Yì Jīng (Classique des changements) et celui qui est en relation avec ce que l’on nomme les prescriptions classiques (jīng fāng 经方). Le Hàn Shū 汉书 (Le livre des Han) qui fut écrit sous la dynastie Han (206 av. jc. – 220 ap. jc.) et qui retrace l’histoire de cette époque évoque clairement la classification des ouvrages de médecine chinoise en deux catégories : ceux de l’école du Yì Jīng (Yì Jīng Pài 易经派) et ceux de l’école des prescriptions classiques (Jīng Fāng Pài 经方派). On retrouve donc historiquement cette différenciation.

Le courant du Yì Jīng (Classique des changements) se fonde sur le yīn yáng, les cinq mouvements, les organes zàng fǔ, sur le concept des canaux et des liaisons (jīng luò 经络) et le nom des maladies que l’on retrouve dans les principaux ouvrages de cet univers médical. Ce courant est influencé par des concepts taoïstes et confucianistes. Son texte fondateur ou en tout cas le plus représentatif est le Nèi Jīng (Classique interne), bien qu'historiquement nous savons qu’il y a eu d’autres livres majeurs de cette approche qui ont disparus comme le Biǎn Què Nèi Jīng 扁鹊内经, comme le Bái Shì Nèi Jīng 白氏内经, le Wài Jīng 外经…

Le courant des prescriptions classiques (jīng fāng 经方) se fonde sur les huit principes (bā gāng 八纲), les 6 systèmes (liù jīng 六经) et le syndrome des formules (fāng zhèng 方证). Cette école descend directement du Shén Nóng Běn Cǎo Jīng (La matière médicale de Shen Nong), du Tāng Yè Jīng Fǎ 汤液经法 (La méthode du classique des décoctions) et finalement du Lùn Guǎng Tāng Yè 论广汤液 qui fut renommé Shāng Hán Zá Bìng Lùn 伤寒杂病论 (Traité des lésions du froid et des maladies diverses) et qui finalement fut scinder en deux ouvrages : Shāng Hán Lùn (Traité des lésions du froid) et Jīn Guì Yào Luè (Précis du coffre d’or). C’est Wáng Shū Hé 王叔和 (201-280) qui rebaptisa le Lùn Guǎng Tāng Yè en Shāng Hán Zá Bìng Lùn à cause des trois premiers paragraphes du texte initial. Ce choix fut malheureux car depuis 2000 ans ceux qui survolent ce texte pensent qu’il n’a pour but que traiter les lésions du froid, ce qui est faux, limitatif et source de malentendus.

Ce sont deux systèmes médicaux complétement différents, autant que peut l’être la médecine chinoise et la médecine occidentale. Leur philosophie est totalement différente, leur dialectique n’a rien à voir l’une avec l’autre. Ce sont deux matrices de pensée distinctes qui analysent l’être humain, la maladie et la thérapeutique de manière distincte.

Le courant médical du Yì Jīng (Classique des changements) intègre des notions taoïstes, des notions de yǎng shēng (养生), de la diététique, de l’acupuncture, de la moxibustion, des plantes. Cette dialectique est basée sur le yīn yáng, les cinq mouvements, les canaux et les organes zàng fǔ alors que le courant des prescriptions classiques (jīng fāng 经方) est essentiellement accès sur l’usage des substances médicinales. Cette méthode est fondée sur les huit principes (bā gāng 八纲), les six systèmes (liù jīng 六经), les syndromes des prescriptions.

L’œuvre de Zhāng Zhòng Jǐng fut aussi étudiée et l’est toujours dans le cadre des théories du Yì Jīng/Nèi Jīng. C’est d’ailleurs la grande tendance en Chine. C’est intéressant, mais il y a peu de chance pour que ça soit en relation avec les concepts originels transmis par Zhāng Zhòng Jǐng qui s’appuient clairement sur le Shén Nóng Běn Cǎo Jīng (La matière médicale de Shen Nong) et le Tāng Yè Jīng Fǎ 汤液经法 (La méthode du classique des décoctions). Utiliser les théories du Nèi Jīng (Classique interne) pour expliquer et utiliser le Shāng Hán Zá Bìng Lùn 伤寒杂病论 (Traité des lésions du froid et des maladies diverses) n’est probablement pas le moyen le plus efficace pour une application clinique efficace. Car toute théorie aussi belle soit elle doit avoir une pertinence élevée dans la vraie vie, sinon, elle ne reste qu’illusion mentale.

L’origine du nom « Shāng Hán Zá Bìng Lùn » et son grand malentendu

Le Shāng Hán Lùn (Traité des lésions du froid) était nommé initialement Lùn Guǎng Tāng Yè 论广汤液. Ce nom fut changé par Wáng Shū Hé 王叔和, le ministre de la médecine impériale sous la dynastie Jin de l’ouest (265 - 316). Car il reconstitua et remit en ordre le fameux ouvrage de Zhāng Zhòng Jǐng  qui avait été dispersé et oublié à cause des troubles sociaux de l’époque. Il opéra certains changements dans le texte original et notamment lui donna le nom de Shāng Hán Zá Bìng Lùn 伤寒杂病论 (Traité des lésions du froid et des maladies diverses) qui inclut le Shāng Hán Lùn (Traité des lésions du froid) lui-même et le Jīn Guì Yào Luè (Précis du coffre d’or). En réordonnant le texte original et on lui donnant un autre nom, Wáng Shū Hé favorisa de nombreux malentendus qui persistent encore aujourd’hui. La mauvaise interprétation de ce texte est renforcée lorsqu’on le compare à un autre courant médical, celui des maladies de la tiédeur (wēn bìng 温病). On a tendance à croire que ce dernier propose le traitement des maladies infectieuses tandis que l’œuvre de Zhāng Zhòng Jǐng celui des pathologies issues d’une lésion du froid. Il s’agit d’une erreur d’interprétation majeure. L’enseignement du Shāng Hán Lùn (Traité des lésions du froid) et du Jīn Guì Yào Luè (Précis du coffre d’or) permet de traiter des pathologies de type vide et de type plénitude, de type externe et de type interne, des syndromes froid et des syndromes chaleur, des maladies aigues et des maladies chroniques. Il couvre l’ensemble des pathologies de l’être humain. En lui-même il représente un système médical cohérent et très riche pouvant répondre à toutes les souffrances des patients qui fréquentent les cabinets de médecine chinoise en Occident, en Europe, en France.

Aujourd’hui, des praticiens ont des résultats exceptionnels, arrivent à traiter des maladies dites difficiles à soigner en appliquant une méthodologie fondée sur le Shāng Hán Zá Bìng Lùn 伤寒杂病论 (Traité des lésions du froid et des maladies diverses) et le Jīn Guì Yào Luè (Précis du coffre d’or). Pourquoi pas vous ?

A suivre…

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